Ne se doutant pas une seconde qu'elle avait de la visite, Adeline continuait tranquillement sa lecture, tandis qu'une seconde salve de coups frappés à la porte, résonnait dans le silence de la pièce... Aïlys, malgré leur prise de bec récente, se décida à intervenir.

- Adi ! ... l'interpella-t-elle. 

- ...

N'obtenant toujours pas de réponse, elle se résolut à crier un peu plus fort.

- ADIIII !!!! Tu m'écoutes oui !!! 

- Aï ! Pas la peine de hurler ! Je ne suis pas sourde !...

- Ce n'est pas ce que je dirai...

- Et puis il me semble de t'avoir demandé de me laisser tranquille !

- T'inquiète pas pour cela ! Pour ça, j'ai bien compris le message mais si je me suis permise de te déranger, c'est que tu as du monde à la porte ! 

C'est alors, comme pour lui donner raison, que de nouveaux coups à la porte se firent entendre..

 

Complètement honteuse, Adeline se précipita à l'entrée afin d'ouvrir. Le livre à la main, elle se fit un devoir de s'excuser auprès de ses visiteurs, venus lui souhaiter la bienvenue dans le quartier. Ils étaient au nombre de quatre, deux hommes et deux femmes.

- Je suis vraiment confuse et désolée... J'étais, à ma décharge, le nez plongé dans ce livre à l'étage et...

« Menteuse ! Tu sais que c'est pas beau de mentir, même à des inconnus ! » lui sussura Aïlys à l'oreille.

- … je vous en prie, veuillez vous donner la peine d'entrer dans mon humble demeure. Je vous demanderai de ne pas faire attention à la pauvreté de l'ameublement. Je n'ai pas encore reçu mes meubles. Continua-t-elle faisant mine de ne pas avoir entendu Aï.

 

 

S'effaçant afin de les laisser passer, Adeline leur dit avec amabilité.

- Faites comme chez vous ! Je vous rejoins d'ici 2 minutes.

En effet, sans plus de cérémonie, elle rouvrit son livre car elle désirait terminer le chapitre en cours.

« Adi ! Tu n'as pas honte ! Tu devrais lâcher ce livre et t'occuper de ces gens... » s'insurgea Aïlys.

Mais elle eut beau lui dire, Adeline ne bougea pas d'un yota tant qu'elle n'eut pas fini les derniers paragraphes. Elle pénétra ensuite à l'intérieur, ignorant avec superbe sa jeune amie de toujours.

Aïlys aurait tout aussi bien pu parler à un mur. Elle s'éclipsa donc pour un petit moment, peinée de l'attitude de sa protégée. 

 

Adeline déposa son livre et rejoignit ses invités qui l'attendaient, sans bouger, entassés dans le petit salon.

- Vous auriez pu vous mettre à l'aise. Je vous avais dit de faire comme chez vous...

- Où puis-je poser ceci ? L'interrompit l'une des jeunes femmes, tenant dans ses mains ce qui ressemblait à un cake.

- Posez le sur la table, ne vous faites pas de soucis ! Je ne suis pas du genre à me formaliser pour des broutilles.... 

Une fois que le cake fut en sécurité sur la table, la jeune femme se présenta comme étant Jade Rosa.

- C'est un joli prénom ! Il te va très bien... lui répondit Adeline en prenant place à table. 

 

Elles furent rejointes en tout premier lieu par un des mecs qui s'arrogea la dernière place assise. Ce qui lui déplut énormément.

« Pour qui se prend-t-il celui-là ? Il aurait pu laisser Jade s'asseoir ! Aucune éducation ! Ah ! Ils sont bien tous pareils, ces mecs ! » s'énervait-elle toute seule dans sa tête. Elle était sur le point de lui dire ses quatre vérités quand l'autre jeune fille les rejoignit.

- Je ne vous dérange pas ? Je peux me joindre à vous, je me sens un peu seule dans le salon...

Adeline était sur le point de lui répondre quand le dernier de ses visiteurs arriva sur ces entrefaites et l'empêcha de répondre en s'exclamant.

- Ah, vous êtes tous là ! Je pensais être tout seul quand je ne vous ai pas vus au salon ! Je pensais que la petite visite s'était terminée prématurément... 

 

- Comme vous voyez, nous sommes ici et n'attendions plus que vous pour commencer. Le coupa-t-elle avec bonhomie, un sourire aux lèvres.

- C'est très gentil à vous, et laissez moi vous dire que vous possédez une charmante maison qui le sera encore plus, lorsque vous l'aurez arrangée avec le bon goût que je soupçonne chez vous...

- Merciii ! C'est vraiment trop mignon de votre part de me dire ça.... Je propose que nous fassions les présentations en bonne et due forme et que nous arrêtions de nous vouvoyer si cela vous agrée à tous !!! .

- Vous agré... quoi ? S'exclama le voisin de table d'Adeline. C'est quoi ce mot de ouf ! Faudrait peut être causer normalement ! Je n'ai rien compris ! On est des gens simples, vous savez mam'zelle. Nous on a pas vécu avec une cuillère en argent dans la bouche... 

 

- Merci beaucoup pour ce moment ! Bon puisque personne ne l'a encore fait... Je vais lancer les hostilités et me présenter !

S'ensuivit à ces mots un regard d'avertissement à l'intention de Marcus, de la part de ses amis qui l'interrompirent dans son geste d'interrompre de nouveau la jeune fille. Adeline ne s'en aperçut pas et continuait.

- Je m'appelle Adeline et je suis ravie de faire votre connaissance. Comme je le disais tout à l'heure mon plus grand souhait est d'être reconnue en tant qu'écrivain à succès si cela m'est possible, entre autres choses. Je viens d'avoir mon diplôme littéraire et aussi d'obtenir un poste à temps complet chez Sims ReadBooks, pour qui je bossais déjà en tant que stagiaire lors de mes études, dans la succursale qu'ils ont ici. 

 

- Cool ! C'est la maison d'édition la plus cotée...Hum ! Pardon ! Moi c'est Paolo. Paolo Rocca pour te servir. Je suis fan de sport et de fêtes... Je ne sais pas encore trop ce que je veux faire dans la vie et étudie plusieurs pistes avant de me décider... A ma droite, la jeune fille aux cheveux colorés, c'est ma cousine Candy Behr... Elle a l'air timide comme ça mais elle cache un vrai cœur tendre de rebelle en herbes....

- Eh ! Je suis là ! Tu pourrais éviter de parler de moi en ma présence et fais attention à ce que tu dis car j'en connais aussi un bout sur toi....

- Comme tu l'auras remarqué, elle est un peu susceptible ! Mais cela ne m'empêche pas de l'aimer. N'est-ce-pas mon petit sucre d'orge ? taquina encore Paolo, en faisant un clin à Adeline, devant la mine renfrognée et boudeuse de Candy. Et à ma gauche, tu l'auras deviné, ce n'est autre que mon meilleur ami Marcus. Il est un peu brut de décoffrage, mais un bon cœur, au fond... 

 

- Puis Jade, le coupa Adeline en se tournant vers cette dernière. Nous avons déjà fait connaissance tout à l'heure. Merci pour ce tour de table Paolo.

- Mais de rien la belle ! Lui répondit-il aimablement, tout en attrapant le livre qui trainait sur la table et qui, à sa grande surprise, le rangea.

Devant son ébahissement, Candy crut bon de préciser.

- Fais pas attention ! Il a beau ne pas en avoir l'air mais c'est quelqu'un de très soigné qui n'aime pas qu'il y ai trop de désordre dans une pièce... 

 

- Non ? Tu me fais marcher Candy, n'est-ce pas ! L'interrogea Adeline, le sourire aux lèvres tout en cherchant à apercevoir Paolo dans le salon.

Avant que Candy ai pu lui répondre, Jade hilare la devanca.

- Eh bien non ! C'est tout lui ! J'ai eu beau tenter de le convaincre de venir faire le ménage chez moi, il y a pas eu moyen, jamais...

- Ah ? Parce que vous êtes ensemble ?

A ces mots, Jade partit d'un éclat de rire auquel se joignit celui de Marcus.

- Je ne vois pas ce qui est drôle ! Protesta Adeline, légèrement vexée.
Avisant son trouble, Candy lui murmura.

- Ne fait pas attention à eux, il leur arrive assez souvent d'être lourdingues et de rire de leurs propre jeu de mots. Ils ne se rendent même pas compte qu'il n'y a qu'eux que cela fait rire... 

 

- Vous m'avez l'air de bien vous amuser ! Puis-je profiter aussi de la plaisanterie ? Interrogea Paolo lorsqu'il revint, à l'intention de Marcus et Jade qui repartirent de plus belle dans leurs éclats de rire.

- Fais pas attention à eux Pao, lui conseilla alors Candy. Tu les connais...

- Ce n'est pas que je m'ennuie, mais l'heure tourne et ce gâteau attend votre bon vouloir à tous pour être dégusté, intervint Adeline à ce moment précis. Il serait peut être temps de lui faire sa fête. Mais auparavant, j'aurai un petit service à te demander Paolo, si cela ne te dérange pas... Tu es libre d'accepter ou de refuser...

- Je t'écoute, vas-y ! n'aie pas peur de me demander ! N'hésite pas...

- Bon, très bien. Voilà, je me lance. J'ai remarqué que tu avais l'air d'être un fan du rangement et de la propreté... Je me demandais, si à l'occasion, cela ne te dérangerait pas de venir remettre un peu d'ordre ici car vois tu, je suis un peu légèrement désordonnée... 

 

Paolo, surpris par cette requête ne sut quoi répondre sur le coup et au moment où il allait le faire, Adeline lança sur le ton de la plaisanterie.

- Je t'ai bien eu ! Si tu avais vu ta tête ! Je suis désolée de t'avoir taquiné de la sorte, c'était par trop...

C'est alors qu'il intervint, lui coupant la parole et asséna à la stupéfaction générale ces quelques mots.

- Saches que je serai très heureux de te rendre ce menu service...

- Quoi ! Mais... Tu ne peux pas ! Pas le faire chez elle et non chez moi !... glapit Jade du salon où elle avait été s'asseoir un moment.

- Tais-toi Jade ! Je peux et le ferai si j'en ai envie. A la différence de toi, Adeline en a un besoin presque vital, elle le dit elle-même, elle fait partie de ces personnes qui n'ont aucune notion de l'ordre, contrairement à toi, que le fait de ne pas en faire est plus une question de paresse et peut être désintérêt... Elle est apparemment comme tous les artistes...

Ne désirant pas que la situation s'envenine, Adeline intervint en lançant.

- Merci pour ta gentillesse Paolo, mais je m'en voudrai d'en abuser ... Ce que je te propose, dans ce cas, vu que ma plaisanterie est tombée à plat, c'est de faire ce que tu peux lorsque tu viendras, comme aujourd'hui, et ce, sans obligation aucune. Ceci étant dit, attaquons la dégustation de ce gâteau...

Le reste de l'après midi se déroula sans anicroches. 

 

Et lorsque survint 18h, tout le monde se quitta avec la promesse de se rappeler afin de faire une sortie. Adeline s'était pas mal rapprochée de Candy et son cousin, au point qu'ils devinssent bons amis.

Après avoir refermé sa porte, elle se rendit compte que le silence était revenu dans la maison et ne l'en apprécia que plus. Elle avait passé un super moment en leur compagnie, mais elle était plus du genre à aimer être tranquille chez soi. 

 

Voyant le reste de cake sur la table, elle se rendit compte que, prise dans le feu de l'action, elle en avait oublié de manger... Elle n'avait en fait rien avalé depuis le matin, avant qu'elle n'aille prendre l'avion ! Ce qui remontait à pas mal de temps maintenant. Et comme pour lui donner raison, son ventre émit, à cet instant précis, un affreux gargouillis. Elle se décida donc de goûter enfin à ce gâteau. Ce qu'elle regretta presque aussitôt tellement c'était mauvais ! Elle se demanda comment Candy, Jade et Paolo avaient pu avalé une horreur pareille !

Elle réalisa soudain, que depuis le début de l'après-midi, où elle avait envoyé paître Aïlys, elle n'en avait plus de nouvelles... Elle espéra soudain qu'elle allait bien et reviendrait vite pour ensuite penser qu'elle devait bouder dans son coin et qu'elle ne tarderait plus à se montrer à nouveau 

 

Elle débarrassa donc la table et mis en route les macaronis, avant de monter deux minutes à la salle de bain, afin de se rafraîchir et de s'admirer. Elle eut beau le faire sous toutes les coutures, ce qu'elle vit dans le reflet du miroir ne lui plus pas du tout... Elle se trouva grosse, laide … Elle s'interrogea sur le pourquoi de la considération de ses nouveaux amis. Etaient-ils vraiment sincères ? En tous les cas, dès le lendemain, elle se mettait au régime salade et au sport, c'était décidé... 

 

Du coup, quand elle passa à table, elle était d'humeur morose et n'apprécia plus autant le fait de s'être fait des macaronis, plat qu'elle affectionnait, en général. De plus, le fait qu'Aïlys soit toujours aux abonnés absents n'arrangeait pas les choses.

 

Elle mangea dans un silence religieux, ressentant cruellement l'absence de son amie de toujours, qui mettait en général un peu d'ambiance, comme elle seule savait le faire et en avait le secret. Ensuite de quoi, elle se fit un devoir de faire toute la vaisselle qui trainait et de jeter ce cake de malheur. 

 

Avant de se coucher, et dans l'espoir de voir apparaître Aïlys, elle travailla son charisme devant le miroir de la salle de bain, avant de passer son pyjama pour la nuit. Elle y travailla ses mimiques, passant de la fille réjouie, étonnée, perplexe... Mais rien n'y fit. Le temps s'écoulait et toujours pas de nouvelles ni de petite voie. 

 

Il était minuit passé, quand elle se résolut enfin à se coucher, avec la peur d'avoir perdu sa meilleure amie, et l'inquiétude qu'il ne lui soit arrivé quelque chose... Dans son inconscient, une petite voie lui disait de ne pas trop s'inquiéter, que la nuit portait conseil... Mais elle ne fit pas de rêves cette nuit là.